Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

Voyage à Djanet - Alger

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12 / ALGER
La dernière étape me conduit à Alger. Alors que je tente de me réchauffer pendant que le pompiste fait le plein d’essence de la moto, trois ouvriers du bâtiment viennent me chercher pour partager leur café accompagné de délicieux gâteaux. Ce n’est pas la première fois que je suis confronté à cette gentillesse permanente des Algériens ; elle se traduit par des petits gestes toujours désintéressés qui font chaud au cœur. J’aime ce pays.

Après un véritable parcours du combattant, j’arrive enfin à trouver un hôtel avec une chambre libre dans la capitale.

Le soir, à la recherche d’un restaurant, je demande tout simplement à un passant dans la rue une bonne adresse pour manger. Il m’emmène au petit troquet du coin où, me dit-il, se retrouvent les gens du quartier. L’accueil est chaleureux comme toujours dans ce pays. La télévision est en marche, une tradition en Algérie et j’ai la chance d’assister à un concert de chansons traditionnelles, un duo entre une chanteuse à le voix profonde et un violoniste d’une pure beauté. Peu après, c’est le vibrant appel à la prière du muezzin qui résonne dans les rues d’Alger. Je me sens alors dans un état second, indéfinissable, avec une pointe de mélancolie au fond de moi . La fatigue est très présente après cette remontée marathon depuis Djanet mais la fin du voyage se précise et j’aurais envie de le prolonger encore un peu.

Lundi 31 décembre 1990. 20 heures. Je rentre d’une très longue promenade dans Alger. J’ai marché des heures durant, au hasard ; j’ai vu des quartiers d’une saleté incroyable jonchés d’immondices, j’ai arpenté des ruelles grimpant sur les hauteurs d’Alger avec des ateliers de confection d’un autre siècle, j’ai vu une fourmilière envahir la ville avec un bruit omniprésent : klaxons, cafés assourdissants, sirènes des voitures de police dignes des plus mauvaises séries américaines, minuscules boutiques de cassettes audio où la musique hurle. J’ai été frappé, effrayé même par l’opposition de deux cultures ; le regard lourd d’un homme barbu portant les vêtements traditionnels à l’encontre d’une jeune femme en tenue occidentale m’a fait froid dans le dos ; combien de temps cette cohabitation entre deux entités opposées pourra-t-elle survivre ?

 

A la fin de la journée, j’ai longuement discuté avec un Algérien dans un café ; il m’a fait part de son inquiétude devant la tournure que prennent les événements dans son pays ; il m’a avoué se sentir un peu désemparé. J’ai terminé ma dernière journée sur le sol algérien en retrouvant mon petit resto et son sympathique serveur avec qui j’ai pu discuter entre deux clients. J’ai retrouvé mon hôtel dans lequel une estrade avait été installée pour accueillir un groupe de chanteurs et fêter la nouvelle année. Je ne me sentais pas concerné par ces festivités, peut-être parce que l’année m’avait réservé de mauvaises surprises, et j’ai regagné ma chambre.

Mardi 1er janvier 1991. Le bateau ronronne régulièrement, le tangage est à peine perceptible, le temps est maussade et l’ennui s’installe. Je passe en revue dans ma tête tous les moments forts de ce voyage, je remercie par la pensée tous les Algériens croisés sur ma route qui m’ont apporté tant de moments heureux. Je sais que ce troisième voyage dans ce superbe pays ne sera pas le dernier et l’espoir d’y retourner bientôt me remplit de joie. Et, quelque part entre l’Afrique et l’Europe, j’ai envie de sourire à la vie.

 Honda 750 XLV

 

Que la paix descende sur ton âme
Comme le silence sur la campagne
Que ta méditation soit pareille
Aux flammes du feu de campement
Que le vent ne tourmente plus

( Verset du Coran )