Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

Kawasaki 1000 Versys

Cela fait à peine cinq minutes que je viens de rendre, un peu déçu, la Kawasaki 650 Versys à la concession de Tarbes. C'est maintenant la grande soeur qui vient à la rescousse pour me consoler.  

"Un véritable couteau suisse" me dit le vendeur en réveillant le moteur. Il me montre brièvement le fonctionnement du tableau de bord qui, comme sur la 650, a conservé la bonne vieille aiguille si lisible d'un compte-tours à l'ancienne. Je note que le moteur est paramétré sur le mode Sport mais le vendeur me dit que ce n'est pas un problème. Il est vrai que je suis de la génération des motards habitués à gérer la puissance d'une moto via l'impulsion donnée à la poignée de gaz sans avoir à passer par des "béquilles" électroniques.

 

C'est parti!

La moto est imposante d'aspect mais dès les premiers mètres, cet embonpoint se fait totalement oublier. J'apprécie la position de conduite naturelle, avec un large guidon idéalement  placé. J'ai décidé de suivre le même itinéraire qu'avec la petite sœur. Cela me permettra de faire une comparaison objective. Justement, ce qui me frappe, c'est la disponibilité du moteur. Le quatre cylindres montre un velouté incroyable. En outre, les vitesses s'enclenchent avec douceur et précision. Notre relation commence très bien!

Je retrouve la montée à la sortie de Séméac. Le moteur est vraiment bien rempli quel que soit le régime et je lui trouve un bruit feutré mais pas insipide pour autant. Il a une sonorité  que je qualifierai de sympathique.

Etrangement, malgré le poids supérieur, je passe l'épingle plus rapidement et avec une sérénité plus grande qu'avec la 650. La moto est vraiment très bien équilibrée et elle me met en confiance immédiatement. Les inégalités de la route sont absorbées avec efficacité et cela contribue à ce bien être qui je ressens au guidon de cette Kawasaki.

J'essaye le shifter qui fonctionne plutôt bien mais je ne suis pas un adepte de ce mécanisme de plus en plus proposé par les constructeurs. J'ai parfois le sentiment, en l'actionnant, que cela brutalise la boîte de vitesses. C'est juste un ressenti mais j'aime quand tout s'enchaîne en douceur, mécaniquement parlant.

J'essaye d'ailleurs le shifter maison, celui que des années de conduite (des dizaines d'années...) m' ont permis de peaufiner, la technique du passage des vitesses à la volée sans débrayer. Un subtil mélange de relâchement de la poignée de gaz qui suit un léger appui préparatoire sur le sélecteur et se coordonne avec l'enclenchement franc et rapide de ce petit bout de métal et se termine par l'ouverture franche des gaz. Ensemble réalisé à la vitesse grand V. Sur la Versys, mes tentatives sont concluantes, les rapports passent avec rapidité, sans le moindre à-coup. Cela demande certes plus de concentration que de laisser faire le shifter, mais c'est quelque chose que j'apprécie, être dans l'action.

 

 

Je poursuis ma route. Ce moteur m'enthousiasme. Il accepte de reprendre très bas dans les tours; j'ai même essayé en 6ième à 36 km/h! A la limite, en conduite calme, on doit pouvoir se permettre d'oublier la boîte de vitesses et se laisser porter par la moto. Très appréciable quand il vous vient l'envie de flâner. Il est d'ailleurs possible de démarrer sur le deuxième rapport sans pour autant avoir besoin de faire patiner l'embrayage.

Le freinage est puissant et je n'ai pas retrouvé cette plongée de la fourche constatée sur la 650. Je pense que cela vient des qualités des suspensions qui me paraissent excellentes et qui participent certainement à cette sérénité que j'éprouve au guidon de cette grosse cylindrée de plus de 250 kg. Elles filtrent très bien les inégalités de la route.

Je m'arrête pour relever la bulle. Cela se fait très rapidement avec l'aide de deux molettes. C'est le réglage qu'il me fallait; je peux maintenant rouler la visière ouverte, bien protégé derrière le large pare-brise.

Autant j'avais été rebuté par le bicylindre de la 650, autant je suis sous le charme de ce moteur. Pourtant, jusqu'à présent, les quatre cylindres en ligne n'ont jamais déclenché chez moi beaucoup de passion car je les trouve trop lisses dans leur comportement. Là, ce n'est plus le cas, je me sens en phase avec lui, je me régale de cette légère manifestation sonore qu'il me fait entendre quand j'accélère. La connexion avec la poignée de gaz est parfaite et c'est un point important pour moi.

Il y a osmose entre nous et j'enchaîne les virages à un bon rythme en toute décontraction. Une moto avec laquelle on ne se pose pas de questions , c'est  un signe de réussite. A aucun moment, même dans les virages serrés, son poids ne m'a rappelé à l'ordre, ce qui démontre son équilibre. Je suppose que cela n'arrivera que dans les manœuvres car, dans ce cas, les kilos ne peuvent se faire oublier!

J'aperçois au loin les Pyrénées sous le soleil et je me verrais bien poursuivre cette relation avec la Versys 1000 pendant quelques heures. Quand l'envie de rouler est présente, cela veut dire que je suis en phase avec ma monture. Je m'autorise quelques accélérations plus fortes et le quatre cylindres prend de l'ampleur, mais jamais avec violence. J'aime cette manière de délivrer la puissance car elle permet de rester maître de la situation. 

De retour dans la concession, j'ai le sourire. Je n'étais pas aussi euphorique tout à l'heure en ramenant la 650 pour laquelle j'ai été moins disert dans mon compte-rendu!  Je suis plutôt intéressé par les moyennes cylindrées mais cette 1000 Kawasaki m'a montré un sacré potentiel et surtout une grande homogénéité. Je reconnais ne pas être un fan de son esthétique mais, une fois au guidon, je l'ai très vite oubliée et apprécié ses nombreuses qualités avec, en pièce maîtresse, ce quatre cylindres réjouissant. 

J'ai passé un excellent moment en sa compagnie!