Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

Triumph Scrambler 1200 XC, le trail naturiste.

Mardi 10 décembre 2019. 13H30. Je suis encore sur le coup de la déception après mon essai raté avec la BMW 750 GS. C’est étonnant comment une moto peut ne pas convenir en fonction de son ressenti personnel. Autant pour certaines je m’y attends un peu compte tenu de leur orientation, autant ce fut une (mauvaise) surprise avec ce trail qui me paraissait sur le papier tout à fait apte à répondre à mes besoins.

Pour ne pas rentrer trop triste à la maison, je parcours quelques kilomètres jusqu’à la concession TBC Triumph de Biarritz. Je suis l’évolution de la marque anglaise depuis sa renaissance et je trouve que ses motos sont de plus en plus belles, originales avec une qualité de fabrication indéniable.

En dehors d’un essai bien lointain avec la première Tiger 900 en 1995 environ, je n’avais pris connaissance de la marque qu’avec un seul modèle, une Tiger 800 en 2016. Malheureusement, la mayonnaise n’avait pas pris, non pas parce que la moto était mauvaise, bien au contraire, mais parce que le moteur trois cylindres ne m’avait pas « parlé ». Les allers et retours des pistons du bicylindre, m’avait manqué.

 

La première Tiger 900.

 

Mais, aujourd’hui, c’est une petite nouvelle que je viens voir. J’en avais vu brièvement une à Pau mais j’aimerais faire plus ample connaissance avec ce Scrambler 1200 pour lequel j’ai eu un coup de cœur à sa lors de sa présentation à la presse ; au point de décider de lui ouvrir un article sur mon site.

Il y en a trois devant la concession et j’examine dans le détail le modèle XC qui me parait correspondre à ce que j’attends d’une moto. La version XE est effectivement superbe, plus aguicheuse, mais sa hauteur de selle provoquée par ses très forts débattements de suspensions est un sacré frein pour moi.

Le concessionnaire sort et me présente la machine. La conversation s’engage naturellement, il y a de la passion qui transpire chez cet homme et c’est avec plaisir que je discute de ma conception de la moto. Nous sommes sur la même longueur d’onde, à la recherche des petites routes qui rallongent l’itinéraire mais qui, surtout, augmentent le plaisir. L’endroit où l’on va devient secondaire, c’est le parcours lui-même qui est le plus important. J’aime sa façon simple de me présenter sa moto.

Il me conseille un parcours sinueux intéressant et démarre le gros bicylindre. Quel beau bruit ! Je m’assois, je suis bien installé, avec un guidon bien relevé. Dès ces premiers instants, j’ai le sentiment que le titre de mon article « le scrambler en version trail » va correspondre à la réalité. Avec mon 1,74 m, je suis modérément sur la pointe des pieds et cela me confirme que la XC est le bon choix. Le concessionnaire m’a d’ailleurs dit que, contrairement aux prévisions de la marque, c’est ce modèle qui est le plus demandé.

Je décolle en douceur, j’aime instantanément ce moteur qui fait patte de velours dans sa manière de tracter l’ensemble. Mais, sous le réservoir, je sens bien les pulsations du bicylindre. L’absence de tout carénage ou pare-brise devant moi me déstabilise un court instant car, au niveau de la position de conduite, il n’y a aucun doute, je suis bien sur un trail!

Je m’engage sur un rond-point étroit et constate la facilité avec laquelle la moto se manie. La route de Saint Pée sur Nivelle s’offre à moi. Je suis sous le charme de ce moteur. Il pousse avec une régularité incroyable, dans un bruit grave très jouissif, mais il n’y a aucune violence dans ses réactions. En outre, la poignée de gaz est très douce et le maniement du sélecteur précis.

J’aime beaucoup le tableau de bord, je trouve qu’il allie modernisme sans pour autant renier le passé. La preuve avec cette fausse aiguille du compte-tours qui se promène au gré des régimes derrière la vitre.

Je repense à la réaction du vendeur de BMW qui me reprochait presque ma conduite trop bas dans les tours. Il devrait essayer cette Triumph, il pourrait constater que, même avec une grosse cylindrée, il est possible de se balader tranquillement sans devoir systématiquement rétrograder!

Un vrai bonheur, ce berlingot , je ne me lasse pas de sentir cette poussée sans brusquerie à chaque accélération.

Par moment, la route se fait plus sinueuse et c’est l’occasion de voir si ce scrambler a bien tout d’un trail. Je réponds oui ! Il se balance aisément d’un angle à l’autre d’une poussée sur le guidon et le train avant prend sa trajectoire avec précision. Je ne peux m’empêcher de comparer cette Triumph à l’Africa Twin. Il y a en effet quelques similitudes entre les deux même si, esthétiquement, elles sont très différentes et semblent s’adresser à un public différent.

Personnellement, je me demande si, avec un minimum d’équipements supplémentaires (avec un pare-brise et des pare-mains notamment), cette Triumph n’aurait pas sa place dans la catégorie des (presque) gros trails munis d’une puissance raisonnable. Car, il n’y a « que » 90 chevaux sous le réservoir de la belle anglaise mais je les trouve particulièrement enthousiasmants. Pour poursuivre la comparaison avec l’Africa Twin, je trouve que cette dernière est plus neutre dans sa mise sur l’angle. Avec la Triumph, j’ai cette impression d’un train avant avec un angle de chasse plus fermé qui donne une vivacité supplémentaire mais peut-être un semblant de précision en moins dans le choix de sa trajectoire.

Le freinage est très bon, sans aucune violence. Il est vraiment dans la continuité d'une moto facile à conduire qui cache facilement sa cylindrée. Cela se confirme lors de deux demi-tours sur une route très étroite. Je les ai réalisés sans tension particulière grâce à un bon rayon de braquage, une hauteur de selle convenable et une finesse à l'entre-jambes. 

En ce qui concerne les suspensions, elles se révèlent efficaces sur les inégalités "douces" mais elles réagissent plus fermement que celles d'une Africa Twin sur les cassures plus nettes. C'est peut-être la limite d'amortisseurs classiques, bien que de qualité, face au mono amortisseur et son système de biellettes. Mais je dois ajouter que le niveau est cependant bon.

Dans la descente qui me ramène vers la ville, je me régale dans les enchaînements de virages et, lors  des accélérations qui suivent dans les lignes droites, je sens alors le gros bicylindre déployer sa puissance dans un martèlement étouffé et je ne m'en lasse pas. Nul besoin de grimper dans les tours tant ça tracte à bas régime. Bravo Triumph pour la réalisation de ce magnifique bicylindre. Car au delà de ses qualités mécaniques, il enchante mes rétines par son esthétique. C'est d'ailleurs tout l'ensemble qui mérite de tels compliments. L'intégration de toutes les pièces de la moto est parfaite et, à chaque arrêt photo, je ne peux m'empêcher d'admirer la beauté toute en simplicité de cette moto. 

Au chapitre des choses qui fâchent, il y a ce pot d'échappement qui court le long de la partie droite de la moto et qui réchauffe exagérément mon mollet. Je n'ose imaginer ce que cela doit être en ville en plein été. Un si gros moteur, ça dégage des calories! J'en fais part au concessionnaire à mon retour. La solution réside dans la suppression du catalyseur mais, écologiste convaincu, j'aimerais voir d'autres propositions. Au travail les équipementiers! 

Pour info, la consommation indiquée sur le tableau de bord à l'issue de cette balade est de 5 litres/100.

Si je vous dis que cette moto m'a laissé froid, je sens que vous n'allez pas me croire.... Elle m'avait énormément plu lors de sa présentation en octobre 2018 mais je peux avouer que mon degré d'amour motocycliste a  notablement augmenté après ces cinquante minutes en sa compagnie!

C'est une très belle réussite, avec une personnalité qui lui est propre et son moteur ne fait que magnifier l'ensemble. Sur le chemin du retour, je baissais mon regard vers ce réservoir plat, à l'ancienne, j'imaginais la selle dans la continuité, comme sur les motos de ma jeunesse. En la regardant une dernière fois avant de repartir, j'ai trouvé que Triumph a su réinterpréter son passé, s'y référer sans en faire trop, sans tomber dans la caricature. Il en résulte une moto résolument moderne avec une touche de classicisme discrète mais bien présente. Le résultat constitue un équilibre esthétique rare qui se transforme, quand on pilote la machine en un grand moment de bonheur. Ce fut le cas pour moi. Une bien belle demi-journée!

 

PS: sur le papier, la Triumph Scrambler 900 semble mieux répondre à mes attentes de motos simples et pas trop coûteuses. Le seul  bémol pour moi se situe au  niveau des chiffres sur les débattements de suspensions: 120 mm à l'avant et à l'arrière, cela me parait très faible et je crains des réactions trop rudes sur les routes bosselées. La moto n'était pas disponible lors de mon passage mais le concessionnaire m'a proposé de revenir un jour prochain pour me faire une idée plus précise de ce modèle. Avec grand plaisir!