Sortie de mon premier roman : L’araignée et les volets de bois

L'imagination en voyage (tome 1) - chapitre 3

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Chapitre 3

" Et merde ! " s'exclama Chris sous son casque alors que la roue avant de sa moto butait contre une pierre plus grosse que les autres et se couchait brutalement sur son flanc. Cela faisait deux heures qu'il roulait sur cette piste du Moyen Atlas et il commençait à regretter son impulsion matinale qui l'avait décidé à quitter le bitume marocain.


Pourtant, tout avait si bien commencé. Sur les conseils du gardien du camping de Midelt, il avait pris la direction du cirque de Jaffar. Le soleil avait accompagné ses premiers tours de roues sur une piste et son coeur battait à tout rompre au moment d'affronter ce terrain nouveau.

Au départ, tout s'était bien déroulé; la piste s'élevait lui offrant un magnifique point de vue, il avait roulé prudemment en évitant les ornières, les passages trop caillouteux, mais, peu à peu, elle était devenue de plus
en plus impraticable pour un motard novice en matière de conduite en tout terrain.


Cette chute était la troisième et Chris commençait à se sentir découragé devant les difficultés. L'envie de faire demi-tour lui effleura l'esprit mais une force intérieure le poussait à aller de l'avant.


Après avoir redressé sa moto, il poursuivit cahin-caha son chemin. Il conduisait mal car c'est avec une rage rentrée qu'il avançait ; il s'en voulait d'avoir choisi un itinéraire aussi difficile.

Qu'allait-il donc chercher sur cette piste perdue ?

 

Moyen Atlas marocain


La peur au ventre, il dut entamer une descente périlleuse sur une piste étroite bordée par un ravin ;une fois l'obstacle franchi, il s'arrêta, livide. Il sentit qu'il perdait pied et décida de se poser un peu plus loin, près d'un ruisseau.

Il mangea lentement en essayant de chasser les idées noires qui le parcouraient.


Il réalisait qu'il n'était pas encore véritablement rentré dans son voyage ; pourtant, cela faisait maintenant deux semaines qu'il avait quitté sa vie routinière.

Il ferma les yeux et se remémora ces derniers jours ; il esquissa un sourire en songeant aux nombreuses rencontres qu'il avait déjà faites, beaucoup plus qu'en une année de sa vie habituelle, il revit les splendeurs de Fès, l'incroyable
labyrinthe de la vieille ville avec ses boutiques d'un autre âge, ses odeurs, ses couleurs, la vision surprenante
de singes dans une forêt de cèdres, les appels à la prière qui le réveillaient tous les matins.
Il resta un long moment perdu dans ses pensées ; il se sentit lentement envahi par un sentiment de
bien-être comme il en avait rarement éprouvé.

La nuit avait pris place et avec elle des milliers d'étoiles qui illuminaient le ciel. Chris se rapprocha du feu qu'il avait allumé quelques instants auparavant. Un froid vif s'était installé mais c'est une douce chaleur intérieure qui irradiait son corps.

Moyen Atlas marocain


Très vite, il se glissa dans son sac de couchage et, bercé par le chant du cours d'eau voisin, sombra dans le sommeil.

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Moyen Atlas marocain

 

Lorsque qu'il pénétra dans les gorges du Todra, Chris ne put retenir un cri, mélange de joie et de
soulagement après ces trois jours de piste. Sa Transalp était méconnaissable ; recouverte d'une
poussière ocre, un flanc de carénage cassé, elle avait abandonné sa tenue de moto propre sur elle
pour celle de baroudeuse. Il l'a remercia de l'avoir emmené jusqu'ici, de sa bonne volonté face à son
pilotage hésitant. Il eut un frisson rétrospectif en songeant qu'il aurait pu crever un pneu, chuter alors
qu'il était seul dans ces montagnes.

Pour l'heure, la recherche d'une douche était sa préoccupation principale et il s'arrêta au premier camping, dans la palmeraie de Tinherir. Il s'installa à proximité d'un vieux Land Rover à la peinture défraîchie.


Quelques heures plus tard, c'est tout naturellement qu'il était invité à manger par ses voisins, un
couple d'anglais de retour en Europe après un long voyage à travers l'Afrique. Des heures durant, ils
lui racontèrent avec un enthousiasme communicatif leurs péripéties de voyage.

Palmeraie de Tinerhir


Chris eut du mal à s'endormir rapidement ce soir là ; peu à peu, l'idée de poursuivre un peu plus en
avant sa route s'insinuait en lui. Pourquoi ne pas faire un saut dans la capitale, tenter de trouver
quelques pièces de rechange pour sa moto et demander un visa algérien. Les descriptions des
régions du Hoggar et du Tassili N'Ajjer par ses compagnons d'un soir l'avaient convaincu de visiter
ces déserts. Tout lui paraissait étrangement simple, il se sentait habité par une sérénité nouvelle pour
lui. Il s'endormit paisiblement.


Il se dirigea donc vers Rabat et sollicita un visa auprès du consulat algérien. Que d'obstacles, que de
complications pour obtenir ce droit d'entrée! A côté, l'administration française avait des airs de club
de vacances. Après avoir patienté des heures, rempli des formulaires en veux tu en voilà, on lui avait
dit qu'il devait attendre deux semaines avant d'avoir une réponse.

Aussi, après avoir réussi à trouver un pneu et une chambre à air de rechange pour sa moto décida-t-il de rendre visite à Mustapha dans la région de Zagora.

Il y reçut un accueil extraordinaire et passa deux jours dans la maison de cette famille marocaine. Autour, il y avait quelques palmiers et le désert ; un matin, très tôt, Chris partitmarcher, fasciné par ces étendues vierges. A son retour, il raconta à Mustapha l'énorme plaisir qu'ilavait éprouvé.

Ce dernier lui proposa alors de le présenter à un de ses neveux. " Je pense qu'il serait
heureux de te faire découvrir sa région " lui dit-il.